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LE CADRE DE L’EXPERTISE AMF

Depuis 2006, le Règlement général de l’AMF oblige la société visée par une offre publique l’obligation de désigner un expert indépendant :

  • lorsque l’offre considérée est susceptible :
    • de générer un conflit d’intérêts ;
    • de porter atteinte à l’égalité entre les actionnaires (ou aux porteurs des instruments financiers visés par l’offre) ;
    • préalablement à la mise en œuvre d’un retrait obligatoire ;
    • lorsque l’émetteur réalise une augmentation de capital réservée avec une forte décote doit également désigner un expert indépendant.

L’instauration de cette nouvelle procédure s’était accompagnée de la publication par l’AMF d’un et d’une recommandation du 28 septembre 2006. C’est ce dernier texte que l’AMF met a jour,  s’appuyant sur une expérience de quatre ans quatre ans et sur les échanges avec les professionnels[1]. Les modifications portent sur le fondement de l’expertise, le déroulement de celle-ci et enfin la qualité de l’expert.

LE FONDEMENT DE L’EXPERTISE

Le conflit d’intérêt ou dit autrement, l’inégalité de traitement entre les actionnaires qui peut en résulter, est la justification même du recours à l’expertise. En l’absence de tels conflits, l’AMF, qui ne se prononce plus sur le prix de l’offre depuis 2006, doit laisser le marché faire son œuvre.

En premier lieu, l’AMF demande que soit explicité le conflit d’intérêt qui a déclenché le recours à l’expert. Ainsi, la lettre de mission du conseil d’administration doit-elle expliciter le fondement règlementaire de l’intervention de l’expert indépendant et décrire, le cas échéant, la nature des conflits d’intérêt qui conduise l’organe de décision de la société visée à recourir à une expertise indépendante. Des éléments que devra reprendre l’expert dans le préambule de son rapport.

Il appartient en particulier à l’expert d’examiner si les situations de conflits d’intérêts identifiées peuvent avoir des conséquences économiques et financières défavorables pour les porteurs de titres visés par l’offre. Lorsqu’existent des accords entre l’initiateur et les dirigeants de la société cible (ou les personnes qui la contrôlent), ou des opérations connexes à l’offre, l’expert doit établir que ces accords ou opérations ne sont pas de nature à remettre en cause l’équité du projet d’offre. Il en est de même lorsque l’offre porte sur des instruments financiers de catégories différentes. La restitution du résultat de ces analyses doit bien entendu figurer dans les conclusions du rapport d’expertise.

LE DÉROULEMENT DE L’EXPERTISE

Il faut laisser l’expert travailler sereinement ; l’expérience a montré que le délai minimum de 15 jours de négociation est souvent compris par certaines banques présentatrices pressées, comme un plafond ! Le régulateur précise, dans ses nouvelles recommandations, que ce délai minimum s’entend désormais à compter de la réception de l’ensemble de la documentation nécessaire à l’élaboration de son rapport.

L’AMF précise également que si des actionnaires minoritaires ou des tiers intéressés à l’offre, se sont manifestés auprès de la société ou de l’expert indépendant afin de faire valoir leurs arguments relatifs aux conditions de l’offre publique, l’expert peut en faire état dans son rapport et indiquer le cas échéant les raisons pour lesquelles il a ou non tenu compte dans son analyse des points de vue ainsi exprimés.

L’expert doit justifier dans son rapport, en des termes adaptés aux caractéristiques de chaque évaluation, la décision d’exclure toute méthode ou toute référence de valorisation ( en particulier s’il s’agit des cours de bourse historiques ou d’une moyenne des cours de bourse) en exposant, lorsque cela est possible, les résultats auxquels la méthode ou la référence exclue aurait[2]

S’agissant de l’appréciation du caractère pertinent du plan d’affaires établi par la direction de la société visée par l’offre, l’expert peut demander à la direction, s’il l’estime nécessaire, de modifier ses prévisions. Si ces demandes sont acceptées par la direction, le régulateur précise que les modifications correspondantes sont mentionnées dans le rapport. A défaut, l’expert peut choisir de retenir un plan d’affaires modifié par ses soins à l’appui de ses travaux d’évaluation. Dans ce cas, il confronte les résultats ainsi obtenus à ceux auxquels conduirait une évaluation basée sur le plan d’affaires de la direction.

S’agissant enfin des synergies entre la société cible et initiatrice, l’AMF reprend sa recommandation de 2006, énonçant que l’expert a accès aux données nécessaires à l’appréciation des synergies attendues dans le cadre de l’opération étudiée, notamment si le montant des synergies a été rendu public. Le régulateur ajoute que, lorsqu’il est fait état de synergies susceptibles de résulter du rapprochement avec la société visée, l’expert indique, le cas échéant, comment il a pris en compte ces synergies[3].

Sur le fond, les recommandations de l’AMF rejoignent quelques grands principes admis de longue date dans l’expertise judiciaire : respect du contradictoire, justification de la position retenue…

LES RÉFÉRENCES DE L’EXPERT

Enfin  l’expert doit dorénavant indiquer dans son rapport s’il adhère à une association d’experts indépendants ; à défaut, il en explique les raisons. Une manière pour l’AMF de pousser les experts à rejoindre une association professionnelle et de mettre un peu d’homogénéité dans une population très diverse, pour ne pas dire disparate.

Dominique Ledouble

[1] Notamment de l’Association Professionnelle des Experts Indépendants (APEI), principale association reconnue par l’AMF sur cette activité.

[2] Sur ce sujet des principaux critères écartés dans le cadre des offres publiques, on se reportera avec intérêt sur le site Internet de l’APEI qui expose les conclusions du groupe de travail constitué à cet effet (www.apei-experts.org).

[3] Sur ce sujet, on pourra également se reporter aux recommandations du groupe de travail de l’APEI sur « les synergies ».

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